Janvier : Nancy Krawczyk, la dame des douches
Discrète et sans chichis, cette quinqua lave, rhabille et remet d’aplomb les sans-abri les plus éprouvés.
«Cela peut sembler difficile à croire, mais voilà : on a rencontré une fée bricoleuse. Une vraie. Celle des contes pour enfants. Elle porte un long tablier qui s’enfile par la tête. En tissu épais, cousu main avec une fermeture éclair vert fluo, qui fait du bruit quand elle s’ouvre.» Lire le portrait.
Février : Yasin Hansye, l’aîné de l’aimée
Le frère de Shaïna, poignardée et brûlée vive à Creil quand elle avait 15 ans, tente de la sauver de l’oubli afin que son souvenir puisse inspirer les adolescentes victimes de violences.
«On s’accroche à ses yeux tristes et bordés de longs cils comme à une main tendue dans la foule. La voix délicate, presque blanche, de Yasin Hansye sonne comme une caresse. Rarement, pourtant, dans la cohorte des tragédies et des chagrins insondables, on a entendu des mots gifler autant.» Lire le portrait.
Mars : Marina Ovsiannikova, la propagandiste repentie
La productrice télé, désormais réfugiée en France, est devenue l’un des symboles russes de la résistance à Vladimir Poutine en brandissant une pancarte «antiguerre» sur la première chaîne du pays.
«Plus de quatre mois qu’on était sans nouvelles de Marina Ovsiannikova. Revoilà l’opposante russe à Paris devant un parterre de journalistes venus du monde entier, telle une cheffe d’Etat en exil. L’ancienne femme de l’ombre est déjà rodée à l’exercice médiatique. Elle relate, méthodiquement, son évasion spectaculaire de la Russie.» Lire le portrait.
Avril : Miriam Cahn, pinceaux sans pincettes
Féministe et en colère, l’artiste se désole d’être accusée d’apologie de la pédocriminalité pour une peinture qui avait été exposée au Palais de Tokyo, à Paris.
«Pour tenir la distance, tous les athlètes professionnels ont un «training quotidien». Miriam Cahn, 73 ans, s’astreint au sien avec la rigueur du maître yogi devant son tapis. Tous les jours de toute la vie, l’incontournable plasticienne suisse se lève vers 11 heures, lit la presse internationale, puis réalise une œuvre à la beauté redoutable et la violence infinie.» Lire le portrait.
Mai : Sébastien Delogu, priorité à gauche
Rencontre fumante avec le député LFI de Marseille, ancien taxi précaire qui a commencé en politique en s’improvisant chauffeur de Mélenchon.
«Dans le bureau de Sébastien Delogu, on cendre dans la poubelle en plastique. Ne pas mettre le feu à l’Assemblée nationale demande une attention certaine, mais le député de Marseille n’a pas trop le choix.» Lire le portrait.
Juin : Léna Lazare, elle est déterre
La porte-parole des Soulèvements de la Terre, dont le gouvernement a annoncé la dissolution en juin – décision annulée par le Conseil d'Etat en novembre –, veut continuer de militer tout en préparant son installation à la ferme.
«C’est donc elle, la dangereuse «écoterroriste», comme dit Darmanin ? L’une de celles et ceux qui font trembler la République, menacent le sommeil des braves gens, empêchent les laitues de pousser, les mégabassines de pomper les nappes phréatiques et les bétonneuses de tourner tranquillement ?» Lire le portrait.
Juillet : Lilian Teypaz, l’un des héros d’Annecy : il n’en fait pas une montagne
Le jeune homme de 19 ans, passionné d’alpinisme, a fait partie des personnes ayant contenu le déséquilibré qui a poignardé des enfants, à Annecy début juin.
«Quand Lilian Teypaz est à court de mots, il dit «wahou». Incrédulité, admiration ou crainte : en trois heures de discussion, il livre cinquante nuances de «wahou». Le 8 juin, cet étudiant de 19 ans a été l’un des protagonistes d’un fait divers terrible.» Lire le portrait.
Août : Chloé Delaume, la fée cabossée
L’écrivaine a traversé une enfance dramatique et une vingtaine gothique avant d’expérimenter la créativité à 30 ans, la sécurité fadasse de la quadra et, à 50 ans, l’ironie face au pathos.
«On a beau s’attendre à la trouver, tel qu’annoncé, au troisième étage gauche, la découvrir au fond du couloir fait un petit effet Shining : comme les jumelles apparaissent à Danny sur son tricycle, elle se tient droite dans l’embrasure de la porte, robe des grands soirs, carré corbeau, griffes à l’avenant. Chloé Delaume est-elle une bonne ou une mauvaise sorcière ?» Lire le portrait.
Septembre : Thomas Brail, l’homme prêt à mourir pour les arbres
L’arboriste-grimpeur était en grève de la faim dans un platane parisien pour protester contre la construction d’une autoroute en Occitanie.
«A une quinzaine de mètres de hauteur, dans un platane le long du boulevard Saint-Germain, un homme dépérit. Depuis le 31 août, soit déjà plus de vingt jours, Thomas Brail est en grève de la faim pour protester contre la construction de l’autoroute A69 entre Toulouse et Castres, la destruction de centaines d’arbres et la disparition de nombreux hectares de terres arables et de zones humides.» Lire le portrait.
Octobre : Daniel Rahamim, le dernier kibboutznik
Cette figure des habitants du pourtour de Gaza a miraculeusement survécu à l’attaque du Hamas et tente de s’accrocher à ses derniers idéaux.
«“Au-delà du sillon de la frontière, un océan de haine et de désir de vengeance gonfle, en attendant le jour où la sérénité viendra affaiblir notre garde.” Ainsi parlait Moshe Dayan, le faucon borgne de Tsahal, dans une eulogie restée célèbre en Israël, rappel d’une noirceur visionnaire sur les implications du projet sioniste.» Lire le portrait.
Novembre : Anne L’Huillier, prix Nobel de physique : d’une seconde à l’autre
Cinquième femme seulement à obtenir cette distinction, la scientifique française voudrait servir d’exemple aux jeunes filles tout en rêvant de retourner à l’anonymat.
«Le monde du travail aussi se divise en deux catégories. Il y a ceux qui tapissent les murs de photos de leurs enfants ou qui alourdissent leurs étagères de babioles ramenées de vacances. Et il y a ceux qui, comme Anne L’Huillier, préfèrent une atmosphère aseptisée.» Lire le portrait.
Décembre : Fariba Adelkhah, femme ravit liberté
De retour en France après avoir été longuement emprisonnée en Iran pour «complot», la chercheuse à Sciences-Po a conservé sa gaîté et sa détermination.
«Elle sourit de ses petits yeux noirs en nous accueillant dans son bureau à Sciences-Po. Sa jovialité est la première bonne surprise. L’appréhension d’une rencontre éprouvante avec la chercheuse de 64 ans détenue pendant quatre ans et demi en Iran est vite balayée. Dès les premiers mots, Fariba Adelkhah dédramatise et ironise sur son long séjour à l’ombre.» Lire le portrait.
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