Il y a dix ans, l’entreprise lui semblait insurmontable. Alors comédienne et chanteuse, travaillant à son premier film comme réalisatrice (De Sas en sas, sorti en 2017), Rachida Brakni l’assurait à Libé, en 2014 : «Ecrire un livre ? J’en serais incapable. Trop intimidée pour ça.» Il faut dire qu’elle a longtemps entretenu un rapport boulimique, si ce n’est fétichiste, à la littérature. Plus jeune, elle rêvait de construire un jour une bibliothèque si haute qu’il lui faudrait une échelle pour atteindre ses trésors, chéris avec un soin confinant à la maniaquerie. «Si je me réfère à Séguéla et sa Rolex, je n’ai pas réussi», s’amuse-t-elle. Rachida Brakni vient en revanche de relever un sacré défi, publiant ces jours-ci son premier livre, hommage à son père, Kaddour, dont elle retrace l’histoire, elle qui n’en avait que des «esquisses».
Né en Algérie, orphelin dès l’âge de sept ans, arrivé en France à 18 ans. Vie de labeur, vie de famille. Deux filles, un fils. Rachida Brakni est l’aînée. Cette mort en plein Covid, à l’été 2020, est une «crevasse» qui lui met «les chairs à vif», et fait sauter son sentiment d’illégitimité face à l’écriture. Bien sûr, elle le fait pour lui, qui ne savait ni lire ni écrire, ainsi que pour la petite fille qu’elle était, mais pas seulement : «Je tenais absolument à ce que ce livre