C’est la période de l’année que Rithy Panh n’aime pas. Deux jours qui s’enchaînent et deux dates qui s’entrechoquent. Les 17 et 18 avril. La première marque l’arrivée des Khmers rouges au pouvoir. La seconde est sa date de naissance. Le début et la fin de tout, mêlés en l’espace de vingt-quatre heures. «A l’approche de ce moment, il s’éclipse, repart se cacher», décrypte Christophe Bataille, romancier éditeur chez Grasset et son frère d’écriture et de voyage depuis vingt ans. Rithy Panh a décidé de ne plus y accorder d’importance. «Pourquoi s’ajouter des symboles de souffrance malheureuse si je peux éviter ?»
Il n’empêche, cinquante ans après la chute de Phnom Penh, le passé finit toujours par se frayer un chemin dans l’oubli et fissurer le non-dit. Avant l’arrivée des hommes de Pol Pot (1925-1998) dans la capitale ce 17 avril 1975, le cinéaste a gardé intact le souvenir d’un «grand silence». Celui qui précède la tempête, pourrait-on écrire par facilité. Dans le cas du Cambodge et du cinéaste, ce fut un anéantissement. Comme deux millions de personnes, la famille Panh doit quitter Phnom Penh pour gagner la campagne, les camps et être rééduquée.
Citadins, intellectuels, bourgeois, les Panh cochent toutes les cases honnies par les hommes de Pol Pot. Le père, directeur de cabinet du ministre de l’Education, entame une grève de la faim. Le fils en p