Vadim Boïtchenko est le maire en exil d’une ville réduite à l’état de champ de ruines, une ville dont chacun a appris le nom pour une mauvaise raison. Depuis l’invasion russe, une géographie de l’horreur place sur la carte de l’Ukraine des lieux que l’on aurait souhaité voir rester anonymes. Avant Boutcha et ses massacres de civils, avant Bakhmout rasé par les déluges d’artillerie, Marioupol a été le premier nom sur cette liste des villes suppliciées.
Toute la vie de Vadim Boïtchenko, 46 ans, est liée à cette ville. Son enfance au parc Veselka à l’ombre de la gigantesque usine Azovstal, le poumon d’acier de Marioupol, sa famille, sa carrière dans l’industrie métallurgique, commencée à 17 ans comme ouvrier. Le lien se rompt brutalement dans la nuit du 27 au 28 février 2022, quand l’édile quitte sa maison, encadré par des membres des forces spéciales ukrainiennes chargées de le protéger des tentatives d’enlèvement russe.
Pendant les quatre-vingt-six jours que durera ensuite le siège de Marioupol, au printemps 2022, Vadim Boïtchenko assistera en spectateur impuissant à la destruction de sa ville. «C’est toujours très douloureux, souffle-t-il en secouant doucement la tête. A ce moment-là, je croyais partir pour une nuit ou quelques jours. J’ai laissé toute ma famille derrière moi.» Celle-ci l’a depuis rejoint à Dnipro où il réside.
Installé en fin de journée dans l’espace petit-déjeuner d’un hôtel parisien, le maire présente une certaine ressemblance avec Volodymyr Ze