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Le portrait

Virginia Tangvald, rester à flot

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Fille d’un marin norvégien qui naviguait à vue entre exploits et tragédies, la néoromancière taille dans l’ombre de la mythologie familiale.
Virginia Tangvald à Paris, le 9 septembre 2024. (Camille McOuat/Libération)
publié le 18 septembre 2024 à 15h00

Elle craignait, en changeant d’appartement après la naissance d’Orphée, son fils de 3 ans et demi, de regretter la vue sur les Buttes-Chaumont, océan vert du XIXe arrondissement de Paris. Elle a emménagé à deux pas, dans un ensemble avec vis-à-vis. De son balcon, elle se surprend à détailler, sans jumelles précise-t-elle, les coursives végétalisées de ces paquebots urbains en partance pour nulle part. Et à aimer ça, le va-et-vient de la vie au quotidien.

Virginia Tangvald est née sur le voilier de son père Peter, un Norvégien baroudeur qui naviguait sans instruments, sans moteur, et sans pilote automatique. De l’ascète au teint tavelé et à la silhouette longiligne, du séducteur qui collectionnait traversées et conquêtes, de l’épris de liberté prêt à tout sacrifier sur l’autel de son rêve, elle ne peut se souvenir. Pressentant le danger, fatiguée de ce capitaine égoïste et misogyne, Florence, sa mère, une Belge amarinée, a mis les bouts quand sa fille n’avait que 2 ans. Aujourd’hui, la gosse bercée de roulis publie un formidable roman autobiographique. D’une écriture ciselée et sensuelle, elle questionne le mythe paternel et revient sur une saga familiale marquée par les drames. Marié sept fois, le «Barbe-Bleue» des embruns a perdu deux femmes en mer, avant de mourir, en 1991, avec Carmen, sa fille de 7 ans, dans le naufrage de l’Artémis de Pythéas, bateau qu’il avait dessiné et construit. Rescapé de ce désastre, Thomas, l’aîné des enfants, poursuivra les mêmes chimères

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