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Balade grecque

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Athènes a beau être en crise, la capitale regorge toujours de lieux atypiques et de musées secrets pour les plus fauchés, mais aussi de bars huppés comme de grands hôtels pour les plus insouciants. Promenades et recommandations dans la capitale et ses alentours en bord de mer.
Au bar Noel, à Athènes. (Photo Myrto Papadopoulos)
publié le 13 octobre 2017 à 17h36
(mis à jour le 16 octobre 2017 à 13h49)

Partir en Grèce, retrouver le soleil ? Tu ne décrocheras pas la palme de l’originalité, cher voyageur : 30 millions de touristes auront choisi la même destination que toi cette année. Dans un pays pourtant ruiné par sept ans d’austérité, le secteur touristique croît, lui, de 7 % par an. Malgré la crise, la Grèce reste bien une oasis, dans un monde qui se rétrécit et multiplie les zones grises. Athènes bénéficie de cet engouement. Et la capitale grecque est de moins en moins considérée comme une simple zone de transit. Rester dans la ville, pour découvrir sa jungle urbaine, mais aussi ses plages toutes proches ? C’est pour toi, touriste futé, qui laisseras les hordes de vacanciers se précipiter vers les îles lointaines. Et que tu sois fauché ou que tu aies une Rolex au poignet, tu trouveras un programme à ta mesure. Alors, béton ou plage ? Culture ou biture ? Budget serré ou prêt à toutes les folies ? Suivez le guide.

Avec moins de 10 euros

N’aie crainte touriste «fainéant», tu pourras tout de même jouer les cigales en ville. D’ailleurs, elles sont très présentes au cœur même de la capitale. De l’ascension du mont Lycabette à l’errance sur la colline de Filopappou, en face de l’Acropole, où les Athéniens vont pique-niquer le week-end, l’air vibre de leurs pulsations ininterrompues.

Mais d’abord, question essentielle : boire et manger ? Proche du quartier hyper touristique de Monastiráki, la place Sainte-Irène est envahie chaque soir par une jeunesse qui apprécie le faible coût d’une bière à 2 ou 3 euros, selon le volume servi. Et pour déjeuner, direction le marché central. Entre les étals de bouchers se cache un petit estaminet dénommé l’Epire, du nom de la région d’origine du chef cuisinier dont la photo en compagnie de Paul Bocuse orne l’un des murs de cette taverne ouverte il y a quinze ans. La plupart des plats oscillent entre 5 et 6 euros, comme cette roborative fricassée de chèvre qu’on peut déguster avec un pichet de vin blanc maison à 4 euros en observant, depuis la salle, les bouchers en tabliers blancs maculés de sang découper d’immenses quartiers de viande sous la lueur des néons.

Les esprits les plus audacieux s’aventureront du côté d’Exarchia (1). Mais aussi à Metaxourgeion, un ancien quartier ouvrier qui attire depuis peu galeries d’art et bars branchés. Là, au milieu des façades taguées et des bordels, repérables à leurs petites lanternes, on trouve quelques restos bars agréables. Comme Cabezon, un peu excentré tout au bout de la rue Keramikou, qui offre boissons et mezzés à prix très compétitifs dans une villa néoclassique dotée d’un agréable jardin intérieur.

A Metaxourgeion, on peut aussi «déguster» de la culture gratuitement. The Breeder Gallery, qui possède une annexe à Monaco, s’y est installé en 2008 et met en avant la jeune scène grecque contemporaine. Un peu plus loin, le collectif Atopos privilégie plutôt les projets culturels et happenings qui valorisent les arts visuels dans une splendide villa néoclassique rénovée qui se métamorphose souvent en l’honneur des artistes invités.

Et puis, Athènes abrite beaucoup de musées moins connus que celui de l’Acropole, tous entre 8 et 10 euros l’entrée. Le plus secret d’entre eux, hélas ouvert uniquement les vendredi et samedi, se trouve à deux pas de la place Syntagma, rue Kriezotou : la galerie Ghika, installée sur cinq étages dans la splendide maison du peintre Níkos Khatzikyriákos-Ghíkas (mort en 1994), offre un panorama surprenant de la création culturelle grecque des années 30 aux années 70.

La galerie Occupy Atopos dans le quartier de Metaxourgeion, en octobre. Photo Photos Myrto Papadopoulos

Avec tout ça, le voyageur n’a toujours pas vu la mer ? Certes, il suffit d’un ticket de métro (1,20 euro) pour l’apercevoir depuis les quais sombres du port du Pirée, ou tout au bout de la ligne de métro qui conduit à Glyfáda. Mais pour en profiter réellement, il faudra débourser un peu plus.

Avec moins de 100 euros

Fatalement, l’horizon s’élargit. A seulement 20 km de la capitale, se trouve Vouliagméni et son agréable plage municipale, ses tavernes les pieds dans l’eau dès l’arrivée dans la rue Agios Nikólaos. On est déjà très loin de la ville. Certains poursuivront jusqu’au cap Sounion, à 45 km au sud d’Athènes, pour se baigner au pied du majestueux temple de Poséidon. Tout ce circuit peut se faire en bus (7 euros pour le cap Sounion). Reste que la vraie liberté se paie plus cher : avec une voiture (40 euros environ) ou même un taxi jusqu’à Vouliagméni (25 euros).

Pour déconnecter plus radicalement encore, rien ne vaut une escapade sur l'île Egine, si proche d'Athènes (depuis le Pirée, 15 euros et quarante minutes en speed boat, ou bien 8,9 euros et une heure de trajet en ferry ordinaire). Le dépaysement est total dès l'arrivée dans le petit port de carte postale de cette île qui fut la première et éphémère capitale de la Grèce indépendante. Derrière le port se trouve un marché aux poissons entouré de multiples ouzeries, qui semblent échappées d'un décor de Zorba le Grec. De nombreux hôtels proposent hors saison des chambres à moins de 40 euros la nuit.

Ceux qui auront préféré regagner la capitale le soir même pourront jouer les contrastes détonants en s’installant au café Zonars, dans le centre-ville, pour siroter un des fabuleux cocktails de la maison (environ 16 euros), suivi d’un inoubliable poulpe grillé à 21 euros, dans ce lieu rénové récemment par les frères Panas. Lesquels comptent ouvrir, dès mi-octobre dans le même voisinage, un bar au sein du «foyer» du Pallas, le plus majestueux des théâtres athéniens.

Et après ? En avant pour le marathon de la nuit athénienne. Pour commencer, un peu de folklore grec au Rota (10 euros l’entrée), club où se produisent nombre de chanteurs populaires. Un peu plus loin, rue Fidiou, se trouve le très couru Frau : bar dansant, qui accueille une faune branchée de hipsters et de jolies filles poseuses. A proximité également, Noel, un bar doté d’une surprenante déco baroque dans un dédale de salles, où l’on danse, boit et fume jusqu’au bout de la nuit.

Au restaurant Noel un bar à la déco baroque où l’on danse, boit et fume. Photos Myrto Papadopoulos

Enfin, si vous n’avez pas sombré vers 4 heures du matin, autant faire un tour rue Tsakaloff, une voie piétonne baptisée du nom de l’un des promoteurs de l’indépendance de la Grèce en 1821. A cette heure-là, surtout en fin de semaine, on y joue encore des coudes pour accéder aux multiples bars de la rue et s’offrir un cocktail à 10 euros. Non loin, sur la place Kolonáki (l’équivalent athénien de Saint-Germain-des-Prés), l’immense terrasse du café Peros, reste ouverte vingt-quatre heures sur vingt-quatre, souvent hantée par des silhouettes solitaires qui s’exilent de l’effervescence des bars voisins, à ce moment incertain où la nuit cède au jour naissant. Le ciel vire au rose ? Il est peut-être temps de rentrer.

Avec moins de 500 euros

Le noctambule épuisé pourrait alors décider de s'offrir aussitôt une nuit au Grande-Bretagne, entre 300 et 400 euros. Palace historique d'Athènes, construit à la fin du XIXe siècle sur la place Syntagma, le Grande-Bretagne a accueilli tous les protagonistes qui ont marqué l'histoire de la Grèce contemporaine. Et notamment un certain Winston Churchill, qui atterrit par surprise à Athènes le 25 décembre 1944 avec pour objectif de mettre hors-jeu la résistance communiste qui vient pourtant de libérer la Grèce. Son arrivée inattendue au Grande-Bretagne ce jour-là évitera in extremis à l'hôtel, qui abritait alors la délégation britannique, d'être dynamité. Les résistants communistes qui l'avaient miné à partir des égouts désamorceront les charges au dernier moment, redoutant les conséquences de leur acte si Churchill lui-même était tué. Aujourd'hui, la seule «bombe» qui menace est celle qui vise le porte-monnaie, notamment dans la boutique attenante à l'hôtel qui propose toute une série de «souvenirs» à plusieurs centaines d'euros.

Mais Athènes abrite également d’excellents restaurants gastronomiques. Tel Spondi, deux étoiles au Michelin, installé dans un quartier typique de la classe moyenne athénienne, à Pangráti, avec des menus entre 73 et 136 euros. Au sein du Hilton, autre hôtel célèbre à l’architecture marquée par la flamboyance du béton des années 60, le restaurant Milos offre lui aussi une cuisine grecque raffinée (100 euros environ). Pour la même somme, les amateurs de poisson ne résisteront pas à la tentation d’un repas chez Varoulko, dans le petit port de Mikrolimano qui jouxte le Pirée. Là, face aux yachts et aux catamarans qui tanguent, les plats présentés par le fils d’un ancien cuisinier de bateaux invoquent l’appel du large.

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