Je vis face au Mont-Blanc. C'est une chance inouïe. J'ai toujours été fasciné par cet endroit, ses ressources aromatiques. La botanique sauvage me passionne. Ici, les levers et les couchers de soleil sont féeriques, les reliefs changent en permanence. Mon père disait: «la journée n'appartient qu'à ceux qui mettent les bottes les premiers». Que ce soit pour traverser les ruisseaux ou partir sur les chemins.
Ce cadre, c’est le paradis de la cuisine pastorale. La montagne c’est mon enfance et mon quotidien aujourd’hui. Je suis insomniaque alors je suis toujours levé à l’aube. J’habite à 1800 mètres d’altitude. Je suis déjà au-dessus des sapins. Ce que j’aime ici, c’est marcher dans les prairies, et dans les pâturages à 1000 mètres d’altitude. Puis il y a les forêts, les sous-bois. Quand tout est légèrement humide, c’est encore plus fort. Il y a des tétragones à l’état sauvage, de la myrrhe odorante, qui a un arôme d’anis, ça ressemble à une fougère. Je cueille des berces, l’une de mes fleurs préférées. Elle a un goût de citron et de pamplemousse. Lorsqu’on dépasse les sapins, on voit toute la montagne à l’horizon. C’est ce que je préfère.
Mes souvenirs de montagne sont bien sûr liés à la cuisine, à mon grand-père qui rentrait à la maison avec son chaudron en cuivre. On ramenait des myrtilles, on allumait le feu, on faisait de la confiture. J’ai toujours vécu dans le respect de la cuisine en famille. Nous étions cinq enfants. On était paysans et on avait une ferme d’hôtes. Nous recevions les étrangers et ce n’était alors pas péjoratif. Les étrangers, ce sont eux qui nous apportaient les nouvelles du monde.