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Libération
reportage

Une Verte, mûre pour le grand jour

A la veille d'une descente de coupe du monde, la fierté de la station des Houches se fait bichonner en attendant la compétition.
(DR / France Montagnes)
publié le 19 février 2016 à 13h02

C’est une longue piste bordée de sapins. Elle s’appelle «La Verte», mais c’est en fait une noire. La fierté de la station des Houches, dans la vallée de Chamonix (Haute-Savoie). 870 mètres de dénivelé et 3343 mètres de longueur. Ce samedi 20 février (à 12h15), elle sera le théâtre d’une descente de coupe du monde, avec les meilleurs skieurs du moment. Comment se prépare une telle piste?

Cela commence début septembre. «On vérifie toutes les installations, les filets de haute sécurité, on regarde si les câbles sont en tension, après on monte les filets, on les héliporte, on les attache aux câbles», raconte Fred Comte, le directeur du club des sports des Houches et de l'épreuve. Il y a un kilomètre cinq de filets à poser, cela représente un mois de boulot.

15000 piquets

Mais le sol n'est pas oublié, on fauche l'herbe, on coupe les arbustes, on élague les arbres (des sapins principalement). Ensuite, il faut s'atteler à la ligne de chronométrage (environ 2000 connexions à vérifier), et nettoyer les câbles s'ils sont oxydés. Ce n'est qu'après que l'on produit la neige (il faut attendre qu'il fasse froid) et que l'on sécurise la piste. Pour ce faire, il faut poser vingt kilomètres de filets, appuyés sur 15000 piquets. A la manœuvre, des guides de la compagnie des guides, des moniteurs de ski de l'ESF et des militaires – Ecole militaire de haute montagne — donnent un coup de main. Vient ensuite le travail de préparation proprement dite de la piste, le modelage des sauts. «On travaille avec des machines pour que la piste soit plate ou qu'on crée des mouvements de terrain», poursuit Comte.

La dernière phase du travail consiste à durcir la neige. Fred comte compare la piste à un «circuit de Formule 1» où il ne faut pas que le goudron soit trop mou. «On injecte de l'eau dans la piste, il faut quelque chose de super-compact, s'il a beaucoup plu, il y aura une injection naturelle. Autrement, on met de l'eau», dit-il. Ils parviennent à descendre jusqu'à quarante centimètres dans le manteau neigeux. «De septembre à février, c'est un travail quotidien, mais au total cela représente un an de boulot». Qui liste les tâches : organisation de la manifestation, création du parking, commercialisation des zones VIP. «C'est très lourd», argumente Fred Comte.

Etre un peu fou

Le jour de la course, 600 personnes sont au travail. L'aléa météo est «énorme», il faut de la neige. «Il faut être un peu fou et vraiment aimer cela, il faut être passionné pour ce genre de choses là», sourit notre directeur. «Il y a beaucoup d'enjeux, on se doit de réussir, délivrer le produit de meilleure qualité possible, ce sont les joies et les affres de l'événementiel». Il le souligne: «la préparation d'une coupe du monde de ski et le ski touristique, ce n'est pas la même chose. On est soumis à la météo. S'il neige demain, il faudra l'enlever de la piste».

Assis au bord de la piste, voilà André Monteli, technicien italien de la société Betamédia qui installe avec ses compères plus de quarante kilomètres de câble, pour «mettre en place toute la technique pour le direct : 23 caméras, un jimmy jibe, la caméra remote». Il explique: «le réalisateur décide où on doit mettre les caméras. Tous les pays récupèrent le signal». Tony Angiboust, technicien du club des sports, explique que l'automne a été «idéal».

Suspense

Plus de soixante-quinze jeunes viennent le lundi précédant la course pour réaliser le «lissage» de la piste. «En bas, il manque beaucoup de neige» dit Tony «Mais cela fait six mois qu'on est dessus. Là, on est pas trop mal, mais toujours pas à l'abri d'une chute de neige». Tony précise «qu'il reste toujours de l'élagage et un peu de fauchage».

Jeudi, le descendeur Guillermo Fayed, 30 ans, local de l'étape, commentait ainsi sa vision de «la Verte». «Il y a beaucoup d'excitation de courir à la maison. Le but, c'est d'essayer de faire la manche la plus parfaite. La piste a bien durci aux endroits où ça avait cassé hier», expliquait le local qui apparaît sur toutes les affiches. «C'est une piste qui a un profil assez facile. Après il y a les deux trois parties techniques qu'il ne faut pas rater. Il ne faut pas faire n'importe quoi. Ca va être très serré et donc ça devient dur. Elle est ouverte à beaucoup de monde», ajoute Fayed.

La préparation de la piste est évaluée à 200000 euros, il en coûte environ 1,7 million pour l’organisation de la compétition. Normalement, entre vingt et vingt-cinq mille spectateurs devraient se presser pour assister à la compétition.

Fiche technique

Altitude du départ : 1871 mètres.

Altitude de l’arrivée : 1001 mètres.

Dénivelé : 870 mètres.

Longueur : 3343 mètres.

Le traceur de la piste est l’autrichien Hannes Trinkl (six victoires en coupe du monde, troisième place aux JO de 1998 et champion du monde en 2001)