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Reportage

«La neige, c’est vivant, ce n’est pas une masse inerte»

Une saison à la montagnedossier
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Descendre en hors-piste dans une poudreuse fraîche comporte des risques. Le rider pro le sait, l’amateur brave parfois inconsidérément le danger... Quel comportement adopter lorsqu’arrive l'avalanche?
(Bob Parish / Flickr.)
publié le 2 avril 2019 à 15h31
(mis à jour le 6 novembre 2019 à 15h37)

Comment sauver sa peau dans une avalanche?» Pour trouver des réponses, des riders suisses aguerris ont lancé l'Ista: l'International Snow Training Academy. ce week-end de mars à Verbier, l'Ista était présente pour expliquer aux riders et journalistes (venus pour l'Xtrem et sa descente freeride du fameux «Bec des Rosses») son programme de formation international destiné aux adeptes de poudreuse et de montagne.

Né en 2015 à Verbier, (Suisse) cette méthode tente de décortiquer la prise de décisions par rapport au temps, au terrain, à la neige et à la visibilité. «On entraîne les gens à avoir de bons réflexes», dit Dominique Perret. Né le 20 novembre 1962 à La Chaux-de-Fonds, le skieur suisse, pionnier de la discipline ski Freeride, a été, entre autres exploits, élu «meilleur skieur freeride du siècle» par les journalistes, lecteurs et internautes de la presse et des médias spécialisés en décembre 2000, aux Board Awards à Paris. Dominique Perret a imaginé et fondé la start-up «Safe mountain SA» à Lausanne dans le but de développer le programme Ista. Des journées sont organisées pour simuler l'avalanche et l'arrivée des secours, et, pour mieux faire, les procédures ont été standardisées entre la Suisse, la France et l'Italie (voir encadré).

Rester à la surface

Retour à l'avalanche. Au moment où elle se produit, il faut voir comment elle atteint le skieur, et, surtout, dans quel état il se trouve. «Qu'est ce qui peut biaiser ma vision? Si je n'ai pas bien dormi, je risque fort de ne pas prendre les bonnes décisions au moment opportun», note Dominique Perret. Le matériel (sac à dos, airbag, détecteur de victime d'avalanche) n'augmente pas forcément la sécurité et ne suffit pas toujours. Lorsqu'une avalanche survient, le but est de rester à la surface explique le fondateur d'Ista. «La neige, c'est très vivant, ce n'est pas une masse inerte, il faut essayer de déterminer si le manteau neigeux est solide ou fragile. Cela peut changer d'un jour à l'autre». Il peut y avoir une neige mouillée, gorgée d'eau et humide, ou au contraire sèche et sans cohésion. «C'est en général la température qui lui donne, ou non, sa cohésion. Dès qu'un rayon de soleil se pointe, le grain peut changer», argumente Perret. Il faut préciser des choses simples:qu'une pente au soleil est généralement au sud, à l'ombre au nord, dans ces conditions, c'est «facile de trouver ton est et ton ouest» souligne perfidement Dominique. Par ailleurs, il faut savoir que la visibilité influence l'individu, la température la stabilité, et le vent les deux. L'orientation des pentes doit être prise en compte. Les précipitations peuvent être aussi déterminantes. Enfin, la pluie alourdit le manteau neigeux et peut provoquer le déclenchement de l'avalanche.

Pains d’explosif

A Verbier se trouve un gros bunker – le plus gros de Suisse- garni de plus de dix tonnes d'explosifs. Des pains qui vont de 1,5 kilo à 5 kilos. Le jour où nous nous sommes rendus au bunker était un «jour facile». La semaine passée, les patrouilleurs – en France, on dit plutôt pisteurs ndlr- ont fait venir 200 charges par hélicoptère. «A force de travailler sur le secteur, on sait très bien où mettre les charges», explique une responsable des pistes, qui précise que tous les «patrouilleurs» détiennent le brevet «minage», permis fédéral explosif. Quand la situation est «trop dangereuse» les pistes restent closes,et le personnel tente de «déclencher au maximum autour des pistes et des itinéraires». Chaque fois qu'une avalanche se déclenche «naturellement», les patrouilleurs en réfèrent à leur chef pour savoir s'ils interviennent ou pas. Eux font fonction de premiers secours, et ils doivent s'adapter à chaque fois aux conditions. Qui varient, bien sûr, à chaque sortie.

Credit: Elysium 2010 / Flickr

Un cours pour apprendre les gestes essentiels

Le cours d’initiation d’Ista, baptisé «Discovery», permet d’acquérir les notions de base nécessaires pour s’élancer sur une pente. Il a pour objectif de réduire les risques et d’apprendre à réagir en cas de problème. Il se déroule lors d’une journée en montagne avec des ateliers théoriques et pratiques. C’est un minimum basique indispensable à tout pratiquant. Le menu résume une journée en montagne: la matinée est orientée autour de la découverte de l’individu et de son environnement ainsi qu’à la méthodologie. L’après-midi tourne autour de l’estimation des risques et de l’identification des terrains. Pour conclure, travaux pratiques avec «gestion de crise» et recherche de personnes ensevelies. Ce cours est dispensé par des guides de montage diplômés UIAGM (Union Internationale des associations des guides de montagne), des accompagnateurs de randonnées et des professeurs de ski agréés par Ista après avoir suivi une formation spécifique.