Menu
Libération
Portrait

Yves Pouliquen: Le magicien d'oeil

Article réservé aux abonnés
publié le 7 février 1995 à 1h24

YVES POULIQUEN, 63 ans, est un grand croisé de la cornée. Chirurgien, il a redonné la vue à des milliers de personnes atteintes de la cataracte. Directeur d’une unité de recherche de l’Inserm, le professeur se bat aujourd’hui pour le don de cornée, sans lequel rien n’est possible. Il vient de publier un roman-plaidoyer.

« Vous avez l’iris frais d’un jeune cheval.» L’oeil rivé au biomicroscope, le professeur Yves Pouliquen s’extasie sur celui d’un patient. Les yeux, c’est sa vie. Soixante-trois ans, le «monsieur cornée» français n’a pas oublié ses premières opérations: la solution antiseptique qu’on badigeonne sur le visage, l’incision précise du bistouri dans le délicat tissu transparent, la découpe circulaire de la cornée avec les ciseaux, la petite lentille vivante que l’on dépose avec sa collerette blanchâtre dans un flacon. Gestes répétés inlassablement au fil des ans pour rendre la vue à des milliers de malades atteints de la cataracte.

Surtout, il n'a pas oublié son tout premier prélèvement: «Une horreur! C'était au domicile de la personne décédée, il y avait la famille.» Aujourd'hui, pareille opération a lieu à l'hôpital et surtout, n'a pas le caractère terrifiant que l'on se plaît à imaginer: «Il faut bien dire au public qu'on n'enlève pas l'oeil entier! Seule la cornée est prélevée et une petite lentille de plastique remise à la place», insiste celui qui opère quinze malades par semaine et n'a rien de l'image de monstre froid qui colle souvent à la blouse des chirur