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Libération

Les glaciers travaillent de la calotte

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publié le 14 mars 1995 à 2h10

Un vrai rêve de glaciologue. Sous une couche de glace, épaisse de

plusieurs dizaines de mètres, un étroit boyau rocheux conduit au poste d'observation idéal. A cet endroit, la pente du glacier d'Argentière (Haute-Savoie) est très raide, presque verticale. Telle une cascade entraînée par sa vitesse, le manteau de glace n'adhère plus au rocher mais s'en décolle d'un ou deux mètres. Vu du dessous, une immense dalle aux reflets bleutés, parcourue de sillons parallèles gravés par le frottement contre la roche avant le décollement, se dresse comme une tenture géante. Quelques entailles témoignent des forces qui travaillent la masse gelée, prête à rompre à tout moment.

6.500 mètres de galeries sous la glace.

Cette salle souterraine, la «cathédrale», coincée entre le lit rocheux du glacier ­le bedrock­ et sa couche de glace, n'est qu'une infime partie de l'extraordinaire labyrinthe qui court sous le massif d'Argentière. Six mille cinq cents mètres creusés pour produire de l'électricité, à l'âge d'or de l'énergie hydraulique, et qui font désormais aussi le bonheur des chercheurs, spécialistes des glaciers.

Ce véritable royaume troglodyte, «Mickey» s'apprête, comme chaque jour, à l'inspecter. Départ à 1.300 mètres d'altitude, quelques virages enneigés au-dessus du village d'Argentière, par le petit téléphérique réservé au personnel de la société Emosson. En quelques minutes, Michel Legland ­Mickey pour les amis­ ingénieur des travaux, se retrouve 60 mètres au-dessus de l'immense langue de