Le lac tueur est un peu siphonné
Le gaz carbonique craché en 1986 par Nyos, le lac de cratère camerounais, avait tué 1800 personnes. Un système d'autosiphon pourrait prévenir ces catastrophes.
GÉOCHIMIE.«Euphorique.» Il y a de quoi être euphorique après le «succès de cette dernière manip' à caractère expérimental», affirme Michel Halbwachs, géophysicien (1) qui continue de se réjouir, plus d'un mois après être rentré du Cameroun, d'avoir apporté la preuve à grande échelle que le dégazage du lac Nyos est possible. Un premier rapport sur la manipulation doit être envoyé incessamment aux six ou sept spécialistes mondiaux du domaine.
En 1986, ce lac de cratère de Nyos avait brusquement craché une énorme bouffée de gaz carbonique, invisible et meurtrier: 1.800 personnes avaient trouvé la mort, asphyxiées par ce gaz lourd qui s'accumule près du sol, et de très nombreux animaux, en particulier des zébus, avaient péri. Depuis cette catastrophe, une escouade de spécialistes, dont Halbwachs et le «technicien de génie» (comme il aime à le qualifier), Jacques Grangeon, n'ont cessé de revenir dans la région pour mettre en place un ingénieux système de dégazage du lac, par «autosiphon».
Selon ces spécialistes, «le gaz carbonique rejeté par les lacs Nyos et Monoun proviendrait des lacs eux-mêmes». Autrement dit, ces violentes bouffées de gaz carbonique ne seraient pas nées d'éruptions volcaniques sous les lacs, mais d'«éruptions limniques» (du grec limnê, lac), autrement dit du dégazage brutal