«Plutium», il a hésité à l'appeler plutium. Mais, décidément, ça ne
lui plaisait pas. Il a préféré «plutonium, cela sonnait mieux». Du nom de la planète Pluton, le dieu des morts, comme il y avait eu uranium (d'Uranus) ou neptunium (Neptune). Surtout, insigne irrévérence, il a choisi d'abréger cette appellation, non par les lettres «Pl» comme on aurait pu s'y attendre (1), mais Pu. Prononcer «piiii youu» à l'américaine ou, si vous préférez, «beuâârrk»...! C'était en 1941, il n'avait pas 30 ans. A 84 ans, Glenn T. Seaborg, «inventeur» d'un des éléments les plus célèbres de la matière, prix Nobel de chimie 1951, se permet toutes les impertinences envers sa chose, pourtant si dangereuse: le plutonium, cet élément «artificiel», devenu tellement encombrant (plusieurs milliers de tonnes) que ses principaux producteurs Etats-Unis, Russie, France, Angleterre... cherchent aujourd'hui comment s'en débarrasser. Lui recommande de le «brûler dans les réacteurs». Fissile, se désintégrant au fil des millénaires, le plutonium «naturel», cosmique, né dans les explosions d'étoiles, n'existe plus sur Terre depuis longtemps. Il a resurgi au labo, entre les mains de Seaborg, alors jeune chimiste-physicien enthousiaste de Berkeley (Californie). Avant que le gigantesque effort de guerre américain, lors du second conflit mondial, en organise la production massive. Lors du «projet Manhattan» de construction de la bombe atomique, qui conduisit à la destruction de la ville japonaise de Nagasaki, l