Ce qu'il aime, ce sont les questions des enfants: «Dis, tu sais
comment ils tuaient les mammouths?» Ou la façon qu'ils ont, une fois «briefés» par les spécialistes, de rembarrer leurs parents: «Non, là tu devrais pas ramasser le silex qui dépasse. C'est peut-être important de savoir où il a été trouvé.» Serait-ce que Jean-Philippe Rigaud, préhistorien au faux air d'Henry Fonda, a gardé son âme juvénile? Ou que, si proche des hommes préhistoriques «C'est nous!» , il se met aisément à leur place. Prêt à vivre leurs chasses au renne ou cheval, à mimer la façon qu'ils avaient, jadis, de tailler le silex?
Un jour de fête de la science, sous le grand abri rocheux de Gorge d'Enfer, au bord de la Vézère, près du village des Eyzies, patrie de Cro-Magnon, il fallait voir le directeur de l'Institut du quaternaire (1) de Bordeaux en train de mimer nos ancêtres préparant le repas. Pendant qu'André Morala taille la pierre et que Jean-Jacques Cleyet-Merle découpe le sanglier (2), lui surveille de gros galets placés dans un feu. Avec précaution, il s'en saisit avec deux morceaux de bois et les jette dans quelques litres d'eau, retenus par une peau de bête tapissant un grand trou. Ce qui fait illico bouillir le liquide, en vue d'un ersatz de potée préhistorique" Homme moderne. Il s'amuse bien, lui qui rêve de «décrire la vie préhistorique sans mots latins ni jargon». Et de faire voir «l'homme derrière les silex et les bouts d'os» en participant au comité scientifique chargé de concevoir le