Déjà, l'ambiance était au mortifère dans la recherche russe:
salaires en retard, peu de moyens pour l'instrumentation des labos, pour se déplacer dans les grandes conférences" Maintenant, les vautours se pointent. Et pas des moindres. Le gouvernement russe lui-même semble prêt à plonger le bec dans ce grand corps malade. Son «ministère du Combustible et des Industries productrices d'énergie» a en effet décidé de confisquer, selon ce que nous a confié un chercheur français de retour de Russie, les «soixante tonnes de gallium» d'une expérience d'astrophysique très particulière, Sage (Soviet-American Gallium Experiment). Soixante tonnes d'un métal rare, accumulé tonne par tonne depuis les années 80, sous les montagnes du Caucase (1), afin de mener une mesure fort délicate: le comptage des neutrinos produits par le Soleil. Particules en nombre plus faible que prévu, résultat qui agite les théoriciens du monde entier depuis plusieurs années. En Italie, une expérience du même genre, Gallex, a trouvé le même genre d'étonnant déficit, depuis le début des années 90, au Gran Sasso, dans les Abruzzes (2). Seulement voilà, à Baksan, l'expérience Sage doit durer jusqu'en 2002, notamment pour vérifier si le flux de neutrinos varie avec le fameux cycle solaire de onze ans. Aujourd'hui, Vladimir Gavrin, le porte-parole de l'expérience, se trouve donc réduit à se battre comme un beau diable pour empêcher le dépeçage de la manip. A l'hebdomadaire américain Science (3), il a confié qu'il imagi