Coïncidence presque aussi explosive qu'un booster de navette au
décollage de Cap Canaveral: c'est à l'heure où Jean-Loup Chrétien, le vétéran des spationautes français, va s'envoler pour Mir à bord d'une navette américaine que Claude Allègre, le ministre responsable des questions spatiales, sonne la charge contre les vols habités. En juillet, il avait déclaré à Libération que «les vols habités ne l'intéressaient pas» et qu'il ne fallait pas se mettre «à la remorque des Américains» (1). Cet automne, l'assaut repart de plus belle. A Ciel et espace (2), il affirme que «les vols habités sont une fausse route». A l'Express (3) qu'il y est «très, très réticent». Il faut dire qu'en matière de mammouth, ce qui se profile en orbite est du genre maousse. Après Mir, la vieille station que les Russes ont assemblée depuis 1986, doit se construire la station spatiale internationale (ISS), sous leadership américain. Une manne étatique de plusieurs dizaines de milliards de dollars (une trentaine pour l'Europe), que n'ont cessé de guigner les grands industriels du spatial, Lockheed Martin aux Etats-Unis, Krounitchev côté russe, Daimler-Benz en Allemagne, Aerospatiale en France... Et qui serait mieux employée chez nous, estime le ministre, à de la recherche en robotique ou télécoms, bref au spatial rentable. Il faut «mettre le cerveau dans l'espace et garder le corps sur la Terre», écrivit un jour l'académicien Jacques Blamont, fervent admirateur (et acteur) des Voyager et autres sondes auto