Stockholm, envoyée spéciale.
Avec une angoisse grandissante, Jacqueline s'est demandé ce qu'elle allait bien pouvoir raconter au roi. Quatre heures de banquet et l'épouse du prix Nobel français de physique 1997, Claude Cohen-Tannoudji, savait qu'il allait falloir nourrir la conversation avec Carl Gustaf, à la droite duquel elle allait être assise. Quant aux responsables du protocole, ils se sont arraché les cheveux. Qui placer à la «table d'honneur», de l'ex-épouse ou de la nouvelle fiancée, toutes deux venues partager la joie d'un des deux prix Nobel d'économie? Histoire de ne pas choisir, c'est le père du susdit qui a finalement fait l'affaire. Deux mois après l'annonce des prix Nobel et les gros titres des journaux (1), c'est la semaine dernière seulement que, pour les impétrants et familles, honneurs, médailles et chèques sont devenus réalité. Décorum. Stockholm, 10 décembre 19 h 05. Le banquet va commencer. «Tiens, nous avons cinq minutes de retard», note Anders Barany, secrétaire du comité Nobel pour la physique. Au son de la Marche solennelle d'Alphonse Mailly, les 90 élus de l'imposante table centrale viennent de descendre les soixante marches de l'escalier de marbre de l'hôtel de ville. On y compte dix prix Nobel mais aussi un roi, une reine (Silvia, dont les Nobel vantent l'intelligence et la beauté, année après année), au moins trois princesses, Lilian, Christina et surtout Victoria, dont la supposée anorexie alimente les conversations du royaume. Les lauréats son