«J’ai de la chance, seule ma moustache a blanchi » les amis de ma promotion ont déjà des cheveux gris», murmure-t-il lorsque vous vous étonnez de voir arriver un «presque jeune homme»: lunettes rondes, bacchantes à peine poivre et sel et regard amusé. A l’Institut d’optique d’Orsay, Alain Aspect développe des instruments d’optique, notamment des lasers, où la matière remplace la lumière, mais il reste avant tout celui qui a apporté la preuve de la mécanique quantique. Cette physique de l’infiniment petit, «si éloignée de l’intuition et du bon sens que la seule façon de l’aborder est le langage mathématique», dit-il. L’exploit, accompli il y a quinze ans, l’a rendu célèbre auprès de générations d’étudiants qui ont dû l’imaginer mandarin retraité ou illustre disparu. Agé de 50 ans, le directeur du groupe d’Optique atomique reconnaît: «J’étais jeune. C’était mon travail de thèse. Peu de chercheurs avaient osé s’aventurer dans la vérification expérimentale de ce qui était devenu un paradoxe soulevé par le physicien américain John Bell. Lui-même qui travaillait à l’époque au Cern (1) m’avait suggéré de commencer par chercher un poste de titulaire avant de me lancer dans pareille entreprise »»
Gémellité parfaite. L’enjeu était de taille: il fallait trancher entre deux conceptions du monde microscopique, celle d’Einstein et celle de Niels Bohr, père fondateur de la mécanique quantique. L’objet de ce sac de noeuds? Les théories des deux géants de la physique convergeaient en