Shelltown, Maryland envoyé spécial
Le mal, raconte Lori Maddox, a d'abord frappé les anguilles. «Dès octobre 1996, on a commencé à en trouver de mortes dans la rivière. Elles avaient des plaies affreuses sur le corps. C'est à ce moment-là qu'on s'est rendu compte qu'il y avait quelque chose de pourri dans l'eau.» Puis les filets des Maddox ont ramené de plus en plus de ces poissons rongés par la maladie. Jusqu'au 6 août 1997, quand Fred, 75 ans, le beau-père de Lori, a vu avec horreur des milliers de poissons crevés qui flottaient, le ventre en l'air, sur les eaux paisibles de la rivière que les Algonquins avaient baptisée Pocomoke, «les eaux sombres». En plus d'un demi-siècle de pêche dans cette rivière qui serpente entre marais et cyprès avant de se jeter dans la baie de Chesapeake, Fred Maddox n'avait «jamais vu ça». Ensuite, tout est allé très vite. Entre le début août et la fin septembre, des dizaines de milliers de poissons morts ont engorgé non seulement la Pocomoke, mais plusieurs (trois officiellement, une trentaine selon les écologistes locaux) des 150 rivières qui font de la Chesapeake le plus grand estuaire et la plus grande zone de pêche des Etats-Unis.
Vertiges et lésions. «Mon premier malade est venu me voir le 30 juillet, se rappelle Richie Shoemaker, un médecin de Pocomoke City, à quelques kilomètres en amont. Il avait fait du ski nautique dans l'estuaire. Trois heures après, il avait été pris de violentes migraines, puis de courbatures terribles, de nausées,