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Portrait

Jean-Robert Petit, 51 ans, glaciologue à Grenoble, part chaque année creuser l'Antarctique à la recherche d'esquimaux géants vieux de milliers d'années. Le goût de la carotte.

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publié le 24 mars 1998 à 21h16

Grenoble envoyée spéciale

L'annonce proposait un travail original, sans horaires fixes, «qui pourra vous amener à tirer un traîneau dans le brouillard.» «J'ai signé des deux mains», raconte Jean-Robert Petit, directeur de recherche au laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement de Grenoble. Il avait à peine 27 ans, un brevet de technicien agricole, un DEA de géophysique et un moral d'acier. Il s'est retrouvé à creuser la glace en baragouinant le russe, au milieu de l'Antarctique et de cinquante personnes, pour en sortir des carottes de glace et remonter le temps. Vostok, station polaire, 3 500 m d'altitude, à 1 400 km de tout point de ravitaillement, température moyenne: 55 °C au-dessous de zéro. «Les conditions de vie là-bas sont très difficiles, dit-il, mais on peut survivre.» Lui a même eu envie d'y retourner. Aujourd'hui, à 51 ans, il rentre de sa neuvième expédition à Vostok, la dernière sans doute, car, cette fois-ci, il a presque touché le fond. Avec des Américains et une imposante équipe russe, ils ont foré à 3 623 m de profondeur, un record. Impossible d'aller au-delà, de toute façon, sous peine de polluer le lac sous-glaciaire. «Mon rêve, c'était de voir la couleur des cailloux du fond. Personne ne sait de quoi ils sont faits. Une fois qu'on le saura, ça n'apportera rien à la vie de tous les jours, mais c'est une curiosité. Comme une émeraude. Le hasard a voulu que, cette année, on en ait remonté. Quand j'ai vu ces inclusions dans les carottes, j'a