Reykjavik envoyée spéciale
«Un homme s'appelait Önundr; c'était le fils de Ofeigr Traîne-les-Pieds, fils d'Ivarr le Pénis. Önundr était frère de Gudbjörg, mère de Gudbrandr le Bossu, père d'Asta, mère du roi Olafr le Saint.» Ainsi commence la Saga de Grettir, écrite au XIIIe siècle en Islande (1). Ainsi commence aussi la saga de Kari Stefansson (fils de Stefan, donc), l'homme qui a décidé d'exploiter les gènes des Islandais pour étudier les maladies génétiques. «La clé pour lire les gènes, c'est la généalogie. Et des arbres généalogiques, en Islande, on en fait depuis dix siècles. Lisez n'importe quelle saga. Elles commencent toutes par d'interminables pages de généalogie», explique le biologiste. En Islande, pays de volcans, de geysers et de glaciers perdu à l'extrême nord de l'Europe, il y avait jusqu'à aujourd'hui deux ressources naturelles: le poisson et l'énergie géothermique. Kari Stefansson vient d'en découvrir deux autres: les gènes et les arbres généalogiques des Islandais. D'où son projet incroyable: créer une banque de données génétiques à l'échelle d'une nation pour localiser les gènes de maladies, les décrypter et en tirer des médicaments utilisables dans le monde entier. Le projet n'est pas aussi délirant qu'il en a l'air. C'est même un programme scientifique et industriel très sérieux. Tellement séduisant même que, dès 1996, des sociétés américaines de capital risque ont misé 12 millions de dollars sur Stefansson pour l'aider à créer deCode, son entreprise de