Les géophysiciens avaient une image encore un peu grossièredu
sous-sol des Alpes. Ils en connaissaient les grandes lignes, la composition des roches, l’épaisseur des différentes couches, mais leurs cartes manquaient de définition. Parfois peu accessible, le relief de la chaîne de montagnes limitait le nombre de leurs relevés gravimétriques (qui mesurent la force de l’attraction terrestre) sur le terrain. Or, ces relevés permettent souvent d’analyser la nature du sous-sol. En effet, la force d’attraction de la Terre varie en fonction de la topographie d’un site. Elle augmente lorsque les masses augmentent, comme c’est le cas en montagne, et diminue lorsque la croûte terrestre (moins dense que le manteau sous-jacent), s’épaissit; c’est aussi le cas en montagne. «En combinant la mesure de la pesanteur en un point donné avec notre connaissance du relief, on en déduit l’épaisseur de la croûte terrestre. En la corrélant avec d’autres observations, on peut même déterminer en détail la nature des roches qui la composent jusqu’à 100 km de profondeur», explique le géophysicien Roger Bayer du laboratoire de géophysique et tectonique de Montpellier.
Alors, pour échapper aux contraintes d’un terrain accidenté, lui et son équipe ont pris de la hauteur. Du Jura à la Méditerranée et de la vallée du Rhône à la longitude de Nice, ils ont parcouru en avion des milliers de kilomètres carrés, embarquant avec eux quelques récepteurs satellitaires GPS (Global Positioning System) et un gravimètre. A