Vous affirmez que nous entrons dans le siècle des biotechnologies.
Comment le définissez-vous?
Nous sommes en train de passer de l'ère industrielle à l'ère «biotech», et c'est un des plus grands changements économiques de l'histoire humaine. Il se produit maintenant parce que les scientifiques peuvent isoler et manipuler les gènes. Mais aussi parce qu'ils ont mis au point des outils qui permettent aux entreprises de les exploiter pour toutes sortes d'activités économiques. Simultanément, on voit émerger une nouvelle sociologie des gènes. De plus en plus de scientifiques pensent que la constitution génétique est plus importante que l'environnement dans la détermination du comportement et de l'intelligence. On voit aussi émerger de nouvelles théories de l'évolution qui légitiment les pratiques des biotechnologies.
Enfin et surtout, dans quelques années, il sera possible d'isoler et de tester les 60 000 gènes humains (Libération du 19 mai) et de manipuler ovules et spermatozoïdes pour changer leur patrimoine génétique. Pour la première fois, des êtres humains pourront dicter le futur évolutif de notre espèce.
Les gens pensent que les manipulations génétiques représentent une grande avancée médicale. Mais ils ne savent pas que ces gènes vont être utilisés dans tous les domaines. On nous promet de nouvelles céréales pour nourrir le tiers monde, des animaux chimériques pour fournir des organes à greffer, de nouvelles sources d'énergie, des bactéries qui digèrent les déchets toxiques"