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Libération
Interview

Federico Mayor, directeur général de l'Unesco. «Nous manquons de rebelles non violents».

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publié le 2 juin 1998 à 4h51

Federico Mayor, 64 ans, directeur général de l'Unesco, n'a pas

oublié son passé de biologiste. Ce dernier semble même le rendre d'autant plus exigeant vis-à-vis de la communauté scientifique, qu'il n'a pas hésité à critiquer pour sa «passivité» à Vérone, lors du séminaire «Sciences et valeurs». Pourquoi une conférence mondiale entièrement consacrée à la science en 1999, à Budapest?

Les scientifiques gardent trop le silence. Il faut que certains s'engagent, en proclamant que la science travaille au bénéfice de l'être humain. Cette réunion peut leur en donner l'occasion. Ce qui nous manque, ce sont des «rebelles non violents», qui s'expriment afin d'éviter des rébellions violentes.  Un engagement contre quoi?

La science appliquée a traditionnellement servi plutôt le pouvoir et la destruction que la construction. Aujourd'hui, il est inadmissible d'imaginer un monde seulement basé sur le marché. Où les scientifiques, dont la grandeur tient à l'indépendance et à la capacité d'apporter des connaissances au monde, ne soient qu'une partie de l'engrenage du marché mondial. Il y a le risque d'une implosion immense d'un système qui n'a que le marché comme objectif. Le célèbre biologiste américain Craig Venter vient d'annoncer qu'il allait, avec des fonds privés, déchiffrer le génome humain plus vite que ne le faisaient les organismes publics.

Justement, il faut affirmer avec force, comme nous l'avons fait (1), que le vivant n'est pas brevétisable. Qu'on ne peut pas déposer de brevets sur