Cetorhinus maximus, la deuxième espèce de poisson la plus grande du
monde, semblait couler doucement sa vie au large des côtes anglaises. Ce requin promenait ses 11 m de long au hasard des courants, la gueule grande ouverte pour filtrer le maximum de zooplancton possible. Peu connu des biologistes, l'animal semblait tenir à sa réputation de gros lourdaud paresseux. L'été, on le voyait flotter en surface, l'hiver il disparaissait dans des eaux plus profondes, ne semblant même pas chercher des zones plus riches en nourriture. Erreur. Pendant trois ans, David Sims et Deborah Quayle (département de biologie de l'université de Plymouth, Grande-Bretagne) ont talonné une cinquantaine de ces squales à l'aide d'un bateau et par GPS (global positioning system), et leur surveillance s'est révélée fructueuse (1).
En réalité, ont-ils découvert, Cetorhinus maximus a tout d'un fin limier. Et son air nonchalant n'est qu'un rôle de composition. Car le requin prend lui-même en filature des milliers d'individus millimétriques: ceux qui constituent le zooplancton. En général les grosses espèces de 2 mm de long. C'est que Cetorhinus maximus n'avale pas tout ce qui passe. Il sélectionne, suit à la trace, et flaire les régions les plus riches en plancton animal. S'il parcourt rarement plus de 10 km par jour, sa recherche est minutieuse: il peut consacrer au moins 12 heures à écumer une zone intéressante. Patience, écoute, flair, sensibilité à fleur de peau. Les systèmes de détection du zooplancton