Certains écrivent des polars pour parler sociologie ou politique. A
l'université de Stanford (Californie), dans un séminaire dirigé par Carl Djerassi et intitulé «Discours éthique par la «science in fiction» ,c'est plutôt un moyen d'aborder l'éthique scientifique. Ce brillant chimiste, devenu romancier il y a 10 ans, a inventé un nouveau genre littéraire: la «science in fiction», des romans qui ont pour héros des scientifiques, pour cadre les laboratoires et pour ressort dramatique les problèmes éthiques et stratégiques de la recherche. Pour démontrer l'efficacité de la «science in fiction» comme outil pédagogique, Djerassi a demandé à 14 étudiants de composer un «renga» (poème japonais écrit par plusieurs auteurs) ayant pour sujet un dilemme éthique. Le résultat -publié cette semaine par la revue Nature (1)- est un surprenant cadavre exquis scientifico-policier. Entretien.
D'où vous vient cet intérêt pour l'éthique?
Il date du moment où j'ai commencé à écrire. Avant, je n'étais pas différent des autres scientifiques, tellement pris par l'analyse du monde qu'ils n'ont pas le temps de s'analyser eux-mêmes. En écrivant le premier de mes cinq romans, j'ai commencé à me demander: «comment se fait la science?». Comment les chercheurs choisissent-ils un labo de pointe, un patron influent, une revue où publier? Quel est l'intérêt d'avoir un nom qui commence par un A plutôt que par un Y pour co-signer un article? Il est clair que presque tous ces sujets ont une dimension éthique. D'une