«On regarde, on touche, on goûte même.» La pédologue Mireille Dosso
sort son long marteau, son Opinel, et sa fiole d'acide à révéler le calcaire. Cette spécialiste ès-sol de Montpellier (1), familière du Brésil ou de l'Afrique, est aujourd'hui au fond d'une tranchée du Languedoc, ouverte dans un ancien champ de céréales. Elle répète les gestes cent fois réalisés devant des paysans, tous dépendant de ce sol qu'ils labourent, sarclent, où ils plantent, moissonnent et qu'ils... méconnaissent. José Pereira Queiroz Neto, agronome brésilien, à l'ouverture du 16e congrès mondial de science du sol (qui s'est tenu du 20 au 26 août), a déploré la situation haut et fort: les paysans ne possèdent pas les «clefs de lecture» de la terre, n'utilisent que «peu» les résultats que certains pédologues «de terrain», qui veulent pourtant «mettre leur science à leur service». Et Alain Ruellan, président du congrès, de mettre en garde contre les ennemis du sol nourricier: «Agriculture hyperproductiviste, pollutions, urbanisation sauvage voyez la Mitidja, les meilleurs sols algériens bétonnés... Les transformations des sols, non maîtrisées, sont dangereuses. Localement, pour la production agricole. Au niveau planétaire, pour le climat.» Car le sol, en échangeant des gaz avec l'atmosphère, participe à l'effet de serre. Devant la menace, les pédologues se mobilisent. A Montpellier, les 3 000 chercheurs ont multiplié les cartes, statistiques et mesures alarmantes sur cette «ressource rare, chère