Lost in space. Le 24 juin, c'était le noir destin de Soho. Un bijou,
Soho (Solar and Heliotropic Observatory). Espion futé, en embuscade à 1,5 million de kilomètres de la Terre, droit devant le Soleil. Ouïe fine et oeil de lynx, le satellite était capable de détecter, dans l'astre, la source de son énergie. De filmer ses tempêtes de surface. De capter ses vents, zéphyrs comme ouragans. De surprendre le suicide de comètes, plongeant bille en tête sur l'étoile. Magnifiquement lancé par la Nasa, en décembre 1995, son espérance de vie spatiale pouvait atteindre vingt ans, au lieu des trois prévus. Pour Soho, le Soleil ne se couche jamais. Son espionnage se doit donc d'être perpétuel. Sauf lorsque ses contrôleurs, parfois, le reprennent en main, depuis le centre Goddard de la Nasa, à Greenbelt dans le Maryland. Comme le 24 juin. Ce jour-là, lui sont transmis des codes réécrits un an auparavant. Soho écoute, enregistre, puis, subitement, perd la boule et son sens de l'orientation. Les contrôleurs pataugent. Cinq heures plus tard, les batteries du satellite sont épuisées. Silence et froid. Soho ne répond plus. Perdu.
Ici-bas, c'est le branle-bas. «J'en mords mon oreiller la nuit», enrage un des pères de Soho. «Si je tenais celui qui a fait ça"», gronde un chercheur. Soho est-il vraiment mort? Rôti d'un côté et congelé de l'autre? Ou dérivant dans l'espace, sans espoir de retour? A Toulouse, les ingénieurs de Matra, qui ont fabriqué l'espion, bouclent leurs valises, forment un comma