Le déclic se serait produit en 1975, à Asilomar (Californie). Pour la première fois cette conférence internationale posait le problème du risque des manipulations génétiques, les chercheurs faisaient le point, se remettaient en question, et proposaient finalement un moratoire. Philippe Kourilsky, 33 ans à l'époque, était invité. Il en retient surtout des débats houleux entre médias et scientifiques qui se sentaient incompris. «Depuis, explique le directeur d'une unité d'immunologie à l'Inserm, professeur à l'Institut Pasteur, je me sens préoccupé par la communicabilité de la science.» Par l'idée que «le scientifique doit mettre la main à la pâte, participer au dialogue social», qu'il faut «éduquer mieux le public» pour «qu'il accepte ou refuse certaines applications de la science».
Leçon. Vingt-trois ans, deux livres (1) et quelques préfaces d'ouvrages de vulgarisation plus tard, le voici dans le grand amphi du Collège de France, l'institution venant de lui confier la chaire d'immunologie (science consacrée aux mécanismes de défense du corps humain contre les microbes). Ce 2 octobre, c'est l'épreuve de la leçon inaugurale. Sagement assis derrière le bureau sur l'estrade, Kourilsky lit son discours à ses pairs en suivant les lignes du doigt. Quelques mots, forcément, sur le système immunitaire, «un immense réseau qui ressemble à l'Internet, où les cellules établissent des contacts fugaces». Il embraye sur le rôle et l'utilité de la science «souvent contestée,