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Libération
Critique

Alan Turing, le premier des nerds.

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Livres. Le prodigieux génie du père de l'informatique.
publié le 11 décembre 1998 à 19h25

La sexualité des nerds, ces fondus d'informatique selon l'argot américain, est toujours problématique. Celle du nerd d'aujourd'hui, boutonneux, portant lunettes à quintuple foyer et drogué à la pizza, se réduit à quelques suées devant les images de Pamela Anderson piochées sur un quelconque site web classé X. Celle d'Alan Turing, nerd historique, lui a carrément coûté la castration chimique en 1952, puisque le génial chercheur britannique, considéré comme le père de l'informatique, avait le mauvais goût d'être homosexuel dans la prude Angleterre.

Le livre que Jean Lassègue consacre au savant s'attache moins au destin étonnant de ce personnage qu'à ses recherches, toujours à la croisée de la biologie, des mathématiques, de l'informatique et de la philosophie. Des travaux qui lui permettront, pendant la Deuxième Guerre mondiale, de décrypter les messages codés par la machine nazie Enigma et destinés à renseigner les sous-marins qui faisaient le blocus de l'Angleterre. A l'origine du concept même d'informatique dans les années 30, Turing participa ainsi à la mise en oeuvre du premier vrai ordinateur, le Mark I, à Manchester en 1948. Il caressa même l'espoir de créer un «cerveau» artificiel.

Le livre est trapu, et les notions scientifiques abordées pas toujours évidentes, malgré les efforts de pédagogie de l'auteur. On en ressort surtout avec l'envie de lire une véritable biographie de Turing. Avertissons illico le lecteur: l'histoire se termine mal, puisque Turing s'est suicidé a