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Libération
Critique

Essai fictif. Le temps d'un repas, cinq grands esprits discutent d'une machine intelligente. Cervelle artificielle au menu. Un savant dîner. John L. Casti. Traduit de l'anglais par Alain Bouquet. Flammarion, 196 pp., 99 F.

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publié le 22 décembre 1998 à 17h11

Les Grecs excellaient dans l'art du «banquet», où savourant des mets

délicieux, les convives se livraient avec un plaisir égal à un échange d'idées contradictoires. Le scientifique américain John Casti a ravivé le genre avec bonheur, en imaginant un dîner où sont invités cinq des plus grands esprits de ce siècle: trois Anglais, le physicien et romancier Charles Percy Snow (1905-1980), le mathématicien Alan Turing (1912-1954) et le biologiste John Burton Sanderson Haldane (1892-1964), et deux Viennois de naissance, le physicien Erwin Schrödinger (1887-1961) et le philosophe Ludwig Wittgenstein (1889-1951). Ils y discutent, avec une grande vivacité, de «la possibilité de créer une machine aussi intelligente que l'homme», sachant que John Casti ajoute un anachronisme à ce dispositif: il introduit des thèmes et des concepts constitutifs de la recherche en intelligence artificielle et en cybernétique, qui n'avaient tout simplement pas encore émergé à l'époque. Au fil des chapitres, aux titres évocateurs («L'Apéritif», «Le Potage»" jusqu'au «Dessert» et au «Digestif»), les débats reconstituent la genèse intellectuelle de la recherche en intelligence artificielle et en font la synthèse épistémologique. Voici donc Alan Turing servant à son auditoire, avec suffisance, les principes de la fameuse «machine» qui portera son nom. Il ne fait pas de doute à ses yeux que ce système de calcul, basé sur une suite de 0 et de 1, variable à l'aide d'un opérateur obéissant à un enchaînement de rè