Phoenix envoyé spécial
Christy Turner, l'homme par qui arrive le dernier scandale indien aux Etats-Unis, est un anthropologue de 65 ans, réputé solitaire et ombrageux. Il est surtout très têtu. Pour tout dire, cela fait trente ans qu'il s'obstine contre vents et marées à répéter que certains groupes d'Indiens se sont livrés autrefois au cannibalisme. Turner soutient sa thèse iconoclaste dans un livre publié en novembre, A Man Corn (1), plus de 500 pages sobrement agrémentées de croquis anatomiques et de photos noir et blanc présentant des amas d'os et des excavations. Outre-Atlantique, où tout ce qui touche aux Amérindiens confine maintenant au sacré, l'ouvrage a déclenché les passions. Attaqué par plusieurs associations d'Amérindiens et quelques scientifiques, Turner a eu les honneurs du prestigieux New-Yorker qui lui a consacré un article-fleuve, et plutôt favorable, de12 pages.
Il reçoit à son domicile, une des célèbres maisons basses et «organiques» dessinées par l'architecte Franck Lloyd Wright, dans une banlieue alanguie de Phoenix (Arizona) entourée de cactus et de collines pelées. Sa quête a commencé par hasard en 1967 alors que, jeune anthropologue obsédé par la question du peuplement de l'Amérique, il se trouve au très riche musée de Flasgstaff, dans le nord de l'Etat, pour comparer des dentitions indiennes et asiatiques. Dans une salle il se penche sur des molaires d'Indiens anasazi, une communauté ayant vécu dans la région entre 700 et 1300 ap. J.C. Avec ces den