«Dans une barrière, il y a toute la société», dit Pierre Lemonnier,
ethnologue spécialiste de la Papouasie-Nouvelle-Guinée. La barrière qui intéresse plus particulièrement ce quinquagénaire au physique de Tintin speedé se trouve chez les Baruyas. Les populations papoues de la cordillère centrale de Nouvelle-Guinée, étudiées à la fin des années 60 par Maurice Godelier, son «patron» au CNRS et son maître en ethnologie depuis près de trente ans. «Quand je vois cette barrière chez les Baruyas, explique Lemonnier, je ne distingue pas seulement une séparation entre les cochons et les légumes, mais aussi la coopération entre plusieurs membres de la communauté qui se sont associés pour l'édifier. Même chose pour la maison. Si l'on plante le pieu de fondation, il faut la terminer dans la journée. Alors, ils coopèrent. A cinq jours de distance de là, chez les Ankavés, on ne fait rien ensemble, et il faut un ou deux mois pour construire la demeure.» Technique et social. Depuis que, jeune étudiant, il a découvert les textes du préhistorien André Leroi-Gourhan, une des figures prestigieuses de l'ethnologie des techniques, Lemonnier s'est attelé avec passion à «faire comprendre les rapports entre représentations du système technique et organisation sociale. Montrer en quoi les techniques sont des productions sociales et pourquoi agir sur la matière est déterminé, notamment, par des rapports politiques, sociaux et religieux». Un programme qui est aussi un combat. Lemonnier s'élève contre