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Des neurones pour le calcul, d'autres pour le pif. En mathématique, l'exact et l'estimé ne font pas appel aux mêmes parties du cerveau.

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publié le 11 mai 1999 à 0h57

Additionner exactement ­ deux plus deux égale quatre ­ ou estimer

des quantités au pif, la fameuse «intuition mathématique», ne sont pas la même opération pour les neurones. Albert Einstein, déjà, l'avait perçu. Avant de se lancer dans des calculs précis, il disait agiter des «idées numériques» sous la forme d'«images plus ou moins claires». Depuis la publication dans le dernier numéro de la revue Science de l'article retentissant d'une équipe franco-américaine (1), c'est une certitude.

Stanislas Dehaene (Inserm) s'est associé à une équipe du MIT (Cambridge, Etats-Unis) dirigée par Elizabeth Spelke pour le démontrer. Aux Etats-Unis, Elizabeth Spelke a joué sur le bilinguisme mathématique. Ses volontaires, bilingues anglais-russe, ont été entraînés à faire des maths dans une des deux langues, les uns leur langue maternelle, les autres non. Ils mettent le même temps à répondre à des questions du type: «41 plus 73 est-il plus proche de 120 ou de 150?» quelle que soit la langue utilisée. En revanche, pour calculer exactement, ils mettent systématiquement moins de temps lorsque la question est posée dans la langue d'entraînement, même pour des nombres très petits. D'où la conclusion des deux chercheurs que les calculs exacts reposent sur un codage linguistique.

En France, Stanislas Dehaene a soumis ses cobayes aux puissantes machines d'imagerie par résonance magnétique du Commissariat à l'énergie atomique. Histoire de voir les zones du cerveau qui «s'allument» au moment des expé