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Libération

Une souris dans la tête. Faire communiquer directement le cerveau et l'ordinateur: l'expérience menée à Atlanta sur des tétraplégiques prouve qu'il est possible de contrôler sa pensée pour déplacer un curseur, grâce à un implant.

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publié le 11 mai 1999 à 0h57

Atlanta (Géorgie) envoyé spécial

Le curseur se déplace par à-coups de gauche à droite puis de haut en bas sur l'écran du Macintosh où s'alignent les lettres de l'alphabet comme sur un clavier. Il paraît hésiter sur une lettre, en saute plusieurs, disparaît sur la droite puis reparaît une ligne plus bas et, soudain, se fige sur le «J» et clique. Revenu au sommet de l'écran, il reprend sa quête incertaine, sautille de lettre en lettre, s'arrête sur le «O», glisse sur le «W» à la ligne suivante, revient et clique sur le «O». Après ce qui semble une éternité, et des dizaines d'autres mouvements apparemment anarchiques du curseur, un nom s'affiche dans l'espace consacré au texte en haut de la page: «JOHN». C'est celui de l'homme qui regarde fixement l'écran, aussi immobile que le lit sur lequel il est étendu, aussi silencieux que l'ordinateur installé au pied de ce lit de l'hôpital des Anciens Combattants d'Atlanta.

John est littéralement un mort vivant. Depuis l'hémorragie cérébrale qui l'a rendu totalement tétraplégique en janvier 1998, ce terrassier de 52 ans vit dans la prison impénétrable de son corps devenu inutile ­ victime de ce «syndrome de l'enfermement» (locked-in syndrome) dont Jean-Dominique Bauby a raconté l'horreur dans son livre le Scaphandre et le Papillon. Les yeux et le battement de ses paupières sont la seule trace de vie sur son visage. Mais il vient de briser la gangue où son esprit est enfermé en écrivant son nom sur l'écran de l'ordinateur. Il lui a suffi d