Hongrie envoyée spéciale
A quoi ressemblait la «mer hongroise» au temps de Charlemagne, qui avait fait construire dans les parages la forteresse de Mosaburg pour marquer la limite occidentale de son empire? Le lac Balaton, à l'ouest de la Hongrie, non loin des actuelles frontières slovène et croate, était déjà la plus grande étendue d'eau d'Europe (600 km2, 80 km de long), plus vaste que le lac Léman (1). Sur les flancs des monts basaltiques de la rive nord n'étaient pas encore cultivés les cépages Keknyellu, Juhfark et Harslevelu qui font aujourd'hui la réputation des vins hongrois. Les prairies de la rive sud n'avaient pas encore vu pousser comme des champignons les villas cossues, si recherchées par les étrangers de toute l'Europe. Et la forêt recouvrait encore les terres du château baroque de Keszthely.
Mais les eaux du Balaton étaient plus claires qu'aujourd'hui, parce que la rivière Zala (50% des affluents), ainsi que les 40 autres cours d'eau qui l'alimentent, ne charriaient alors ni phosphore, ni azote, venus des lessives, des détergents et des fertilisants agricoles. Le Balaton n'était pas encore asphyxié. Cette «eutrophisation», maladie classique des eaux trop riches en matières nutritives, signifie invasion d'algues, aggravée l'été quand il fait chaud et redoublée en eaux peu profondes. C'est laid, ça gâche la baignade et tue les poissons, qui manquent d'oxygène. Encore heureux, sourit un technicien de l'Inspectorat local de l'eau, que «depuis l'effondrement du Rid