Si les chèvres de monsieur Turner, le directeur de la société de biotechnologies canadienne Nexia Corporation, savaient pourquoi elles ont été conçues, elles grimperaient au plafond. Ou joueraient les chèvres de luxe. Car les descendantes des deux boucs transgéniques Webster et Peter ne serviront pas à fabriquer du fromage. Jeffrey Turner aspire pour elles à des ambitions plus raffinées. Qui pourraient faire sa fortune. Il espère que le gène de protéine de soie d'araignée qu'il a introduit dans le patrimoine génétique de ses deux boucs sera transmis de façon héréditaire à leurs filles (cf. infographie). Grâce à leur glande mammaire, proche de la glande séricifère de l'araignée, elles pourraient alors produire la précieuse molécule sous forme soluble dans leur lait. Si c'est le cas, le Kevlar antichoc de la société DuPont de Nemours ne résisterait pas, pas plus que d'autres fibres textiles comme le Nylon ou la rayonne.
L'armée intéressée. Long d'un kilomètre, quand le fil de laine mesure tout juste 10 cm, le fil de soie concurrence les fibres végétales ou animales, mais également les fibres synthétiques. Les molécules qui la composent sont particulièrement grosses et solidement reliées entre elles. Résultat: elles résistent mieux aux tensions et «ne se séparent pas lorsqu'on les étire. En ce sens, la soie des toiles d'araignée est encore plus intéressante que le Kevlar», affirme Bernard Mauchamp, directeur de recherche à l'unité nationale séricicole de l'Inra de Lyon. «Une étu