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Libération
Interview

«Le seuil critique de 3 000 rongeurs au km2 est dépassé»

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publié le 24 octobre 2000 à 5h43

Entretien avec Matt Keeling, chercheur au département de zoologie de l'université de Cambridge (Grande-Bretagne).

Votre modèle explique-t-il toutes les épidémies de peste?

Pas dans le détail: les conditions locales influent par exemple sur le moment du déclenchement de l'épidémie humaine, et cela varie considérablement d'un endroit à l'autre. Pour avoir une représentation exacte de chaque épidémie, il faudrait affiner les paramètres et avoir de bonnes données, ce qui est rarement possible. Mais ce modèle permet une bonne compréhension de la dynamique de la peste bubonique, à tout moment et en tout lieu.

Lorsque la peste est endémique (présente dans une faible partie de la population de rongeurs), dites-vous, une épidémie peut démarrer, chez les rongeurs d'abord, chez l'homme ensuite. Quels sont les facteurs déclencheurs?

L'histoire montre que la peste peut persister longuement dans une population de rats, qui sert de réservoir. Cela explique pourquoi, malgré des quarantaines extrêmement sévères, les épidémies humaines étaient fréquentes dans l'Europe des XVe et XVIe siècles. L'infection n'arrivait pas de l'extérieur: elle passait du réservoir ­ les rats ­ aux hommes. La peste de Londres au XVIIe siècle a ainsi été causée par une petite population de 50 000 rats qui étaient restés infectés pendant plusieurs années. La maladie peut ensuite se propager parce que des rats changent de quartiers à la recherche de nourriture, ou encore par le passage de l'infection de la population rés