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Libération

Archimede se cachait sous la Bible

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publié le 9 janvier 2001 à 21h37

Elle a la peau ridée par les siècles, usée jusqu'aux dernières fibres à force de manipulations, mitée par les micro-organismes et tatouée par les moisissures. Elle aurait pu brûler dans des incendies de bibliothèque, se perdre entre Constantinople, le monastère de Mar Saba et Jérusalem, où elle a séjourné, finir en cocotte en papier et se volatiliser des milliers de fois. Les historiens ne savent d'ailleurs rien de sa vie entre le XIIe et le XXe siècle. Elle a totalement disparu. Mais, depuis 1998, contre 2 millions de dollars versés à Christie's, cette copie retrouvée du Xe siècle des deux plus importants traités d'Archimède appartient à un collectionneur anonyme. Et, depuis le mois de mai, elle continue sa vie sous les lumières indiscrètes de deux équipes de physiciens américains.

La religion plus importante que la physique

Car pour avoir survécu aussi longtemps, pour avoir échappé aux pillages et été si précieusement gardée, la copie du Traité des corps flottants et de la Méthode des théorèmes mécaniques d'Archimède a un secret. Elle s'est cachée sous les traits d'un autre ouvrage. Une bible écrite au XIIe siècle par un moine orthodoxe. «C'est sans doute ce qui l'a sauvée, raconte Roger Easton, physicien au centre d'imagerie électronique du Rochester Institute of Technology (RIT), à New York. Le moine copiste devait manquer de support pour écrire et comme, à l'époque, la religion était plus importante que la physique, il a effacé le traité écrit deux siècles auparavant, gra