Menu
Libération

Lauer dans les bras d'Osiris

Article réservé aux abonnés
publié le 17 mai 2001 à 0h54

Jean-Philippe Lauer a rejoint Imhotep. Le plus âgé et le plus célèbre des égyptologues français est mort mardi à Paris, à l'âge de 99 ans, a-t-on appris hier. Il avait consacré toute sa vie au site de Saqqarah, le plus ancien monument de pierre taillée au monde. Lorsque jeune architecte, il est arrivé sur ce site en 1926, à une trentaine de kilomètres au sud-ouest du Caire, Saqqarah n'était qu'un plateau battu par les vents, couvert de pierres et dominé par une étrange pyramide à degrés: la tombe du roi Djoser. Il a passé le reste de sa vie à déchiffrer ce puzzle, à remonter chaque colonne, à explorer le moindre caveau. Soixante-dix ans pour reconstituer l'oeuvre construite par Imhotep, le premier architecte connu de l'histoire, il y a 4 800 ans.

Hanté par Saqqarah. Tel un fantôme, Jean-Philippe Lauer continuait de venir l'hiver à Saqqarah, vingt-cinq ans après sa retraite du Service égyptien des antiquités dont il était le dernier employé étranger. Dans la petite maison de fouille aux murs blanchis à la chaux, il était chez lui, sans eau courante, ni électricité, ni frigo, ni chauffage. Il n'y a jamais eu le téléphone. Lauer, même nonagénaire, continuait d'arpenter «son» site, bricolant une colonne par-ci, fignolant un détail par là, en pestant contre «les hordes de touristes ignares en bermudas» et les ouvriers qui «ne sont plus ce qu'ils étaient». Cette vie d'ascète l'a conservé dans une forme étonnante et, jusqu'à l'année dernière, il donnait des conférences ou improvisai