Qui n'a jamais vu ce dessin présentant sur un même plan un chimpanzé qui se redresse petit à petit, «s'humanise» à chaque image pour terminer en homme? Il fait hurler les paléontologues depuis des années. Cette idée d'une évolution linéaire dirigée vers l'homme reste pourtant bien ancrée dans les esprits. On la retrouvait même dans l'énoncé d'un sujet du baccalauréat 2001. Pour Pascal Picq et Yves Coppens, du Collège de France, il y avait urgence à poser noir sur blanc l'état des recherches. Trois ans de travail et 1 200 pages plus tard, leur ouvrage Aux origines de l'humanité se veut une approche scientifique de l'évolution de l'homme, ambitieuse et unique en France (1).
«De l'apparition de la vie à l'homme moderne». Dans ce premier tome, les chercheurs démontrent que nous ne descendons pas des grands singes africains. Nous partageons des ancêtres communs. Vers quelle époque les trouve-t-on? Les hypothèses penchent pour 7 ou 8 millions d'années, lors de la formation de la vallée du Rift en Afrique, une barrière climatique et géographique. Yves Coppens a proposé un scénario baptisé East Side Story, dans lequel les lignées des hommes et des australopithèques se seraient développées dans la savane, à l'est de l'Afrique, où les fossiles sont nombreux. La branche des grands singes aurait prospéré à l'ouest, dans la forêt, où les découvertes sont rares.
Les deux dernières découvertes importantes en Afrique ont brouillé les pistes: Orrorin (6 millions d'années) confirme que la bipéd