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Libération

Survivantes de l'enclume à diamant.

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publié le 26 février 2002 à 22h24

Les défenseurs des droits des microbes crieront au crime. Des biologistes du département de géophysique de l'Institut Carnegie à Washington ont soumis d'innocents unicellulaires à une torture extrêmement raffinée dans le but avoué de tester leurs limites physiologiques. Résultat: l'enregistrement d'un record d'endurance digne d'être inscrit dans le grand livre du même nom. Anurag Sharma, James Scott et leurs collègues démontrent, article à l'appui publié vendredi dans la revue américaine Science, que des bactéries peuvent survivre à des pressions bien plus hautes que celles rencontrées dans les hauts fonds de la Planète bleue. Ces organismes, ont-ils découvert, sont capables de respirer encore sous l'effroyable pression de 10 600 bars, 10 600 fois la pression atmosphérique.

Abysses. Certes, on sait que des microbes croissent et se multiplient au fond de la plus grande faille sous-marine, la fosse des Mariannes, sous 10 000 mètres d'eau. Des chercheurs japonais en ont récemment ramené. Dans ces abysses-là, la pression monte à 1 000 bars. Vivre dans un tel étau semblait déjà un défi aux lois de la biologie. Mais dans leur laboratoire du Carnegie institute, Anurag Sharma et son équipe ont montré que les microbes les plus ordinaires pouvaient braver une pression dix fois plus forte encore. Ils ont gratifié ainsi le domaine de la vie d'une extension incongrue.

Car 10 600 bars, ça n'existe ni sur la terre ni sous la mer. Les chercheurs ont créé cet environnement infernal grâce à un