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Hommes de zoo au temps des colonies

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Anthropologues et historiens se penchent sur les exhibitions d'indigènes, arrêtées en 1931.
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publié le 26 mars 2002 à 22h42

Qui se souvient de 1931, pas de la grande exposition coloniale mais de l'exhibition des Kanaks venus pour l'occasion, parqués au jardin d'Acclimatation du bois de Boulogne et pour qui les visiteurs payaient 5 F supplémentaires ? Le prospectus titrait alors «cannibales». Ensuite, ils furent envoyés en tournée en Allemagne. Cette exposition fut la dernière du genre en France. Mettant un terme à soixante ans de shows ethniques qui eurent lieu dans toute l'Europe et aux Etats-Unis et connurent leur heure de gloire à la fin du XIXe siècle.

Aujourd'hui, alors que les historiens revisitent la colonisation, pour la première fois un ouvrage faisant appel à des auteurs de tous les pays concernés vient dévoiler un phénomène largement occulté des histoires nationales, les zoos humains (1) comme les auteurs l'ont appelé de manière provocatrice. Ces exhibitions d'indigènes, qui ont touché des millions de spectateurs de Paris à Hambourg, de Londres à New York, de Moscou à Barcelone, ont favorisé en Occident le passage progressif d'un racisme scientifique à un racisme colonial et populaire. En 1860, la théorie de la hiérarchie des races est largement implantée chez les savants qui au départ cautionnent ces exhibitions. Pour les auteurs, elles ont marqué les mentalités.

«Chevelure bizarre»

Au XIXe siècle, la France et d'autres pays européens consolident leurs empires coloniaux. Mais qui a vu en chair et en os l'Africain, l'Indien, le Kanak, l'inconnu, l'indigène ? En 1875, Carl Hagenbeck, commerçant de Hambourg à