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Libération

René Thom au point de non-retour

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publié le 31 octobre 2002 à 1h35

«Au fond, jamais je n'ai voulu faire des mathématiques (1).» René Thom se destinait à la philosophie des sciences ; il aura d'abord été l'une des grandes figures des mathématiques du XXe siècle. Le savant français s'est éteint le 24 octobre à Bures-sur-Yvette (Essonne), à l'âge de 79 ans, des suites d'une longue maladie. Dans une discipline souvent méconnue du public, son nom avait fini par sortir du sérail des mathématiciens. Non pour avoir reçu, en 1958, la médaille Fields, l'équivalent du Nobel pour les mathématiques, mais pour avoir publié une «théorie des catastrophes» en 1972.

Son goût immodéré pour les mathématiques, René Thom l'avait contracté dès l'enfance. Il racontait que, dès 10 ans, il s'était forgé une solide capacité à «voir» et à penser dans un espace à quatre dimensions (1). Une aptitude peu banale à un âge où on joue encore aux billes. Ballotté entre la Suisse, Lyon puis Paris au début de la Seconde Guerre mondiale, René Thom intègre logiquement l'Ecole normale supérieure en 1943, puis suit son maître Henri Cartan à Strasbourg en 1946, où il entre au CNRS, puis à l'université (1954). Il rejoint l'Institut des hautes études scientifiques (IHES) de Bures-sur-Yvette dix ans plus tard, dont il deviendra professeur émérite à sa retraite en 1988. Il avait été élu à l'Académie des sciences en 1976.

Caustique. «Il parlait peu, mais il était très présent, raconte Jean-Pierre Bourguignon, le directeur de l'IHES, qui avait assisté aux séminaires de René Thom à la fin de