Dans le cosmos, les monstres peuvent aussi naître en silence. C'est Félix Mirabel, astrophysicien au Commissariat à l'énergie atomique (Saclay) qui l'affirme dans Science, ce vendredi. Les monstres, ce sont les trous noirs stellaires. Ces astres énigmatiques dont la densité est si élevée l'équivalent de quatre soleils dans une sphère de 12 kilomètres de rayon que rien ne peut en sortir, même la lumière, d'où leur nom. Invisibles, mais perceptibles par l'énorme attraction gravitationnelle qui les conduit à happer tout ce qui passe à leur portée. Leur naissance, en revanche, se produit dans une explosion de lumière, baptisée supernova. De quoi envoyer un faire-part du fin fond de l'Univers. Du moins le croyait-on jusque-là.
En 2001, toutefois, un théoricien de Los Alamos émet l'idée que des trous noirs stellaires pourraient se former «directement». Par un effondrement de l'étoile sur son coeur, mais sans éjection de matière et, donc, sans flash lumineux. Naissance discrète. Mais pure théorie. Elle va donner à Félix Mirabel l'occasion d'une formidable démonstration «d'astronomie virtuelle», explique-t-il, de l'art de faire des découvertes majeures sans dépenser un centime en observations nouvelles.
Ce qu'il faut, à cet art, c'est l'aptitude «à formuler les bonnes questions, puis à dénicher les informations déjà connues qui permettent d'y répondre.» La bonne question était : qu'est-ce qui pourrait bien différencier un trou noir formé «directement» de celui né d'une supernova ?