Dans la coquille, il y a un embryon de poussin. Et dans la bouche de l'animal, il y a une dent, une minuscule incisive, émaillée, innervée, potentiellement parfaite. Une dent de souris, en réalité... Un oiseau dentu, avec une bouche sans bec qui évoque plutôt celle du rongeur que de la poule : voilà l'étrange chimère qu'a obtenue une équipe de chercheurs conduite par Efthimios Mitsiadis, à l'Ecole normale supérieure de Lyon, et Josiane Fontaine-Pérus, du CNRS de Nantes (1). Précisons : l'animal n'a jamais vu le jour, il n'était pas viable faute de bec.
Phénomène mystérieux. Le but de cette manipulation, précise Josiane Fontaine-Pérus, «n'est pas de faire naître des monstres». Elle s'inscrit dans une recherche fondamentale sur un phénomène fort naturel et néanmoins très mystérieux : le processus de formation des dents, l'odontogenèse. Efthimios Mitsiadis, dentiste et chercheur, en est, précisément, l'un des spécialistes mondiaux, tandis que Josiane Fontaine-Pérus travaille de longue date à comprendre le développement de l'embryon, avec pour modèle d'étude, notamment, l'oiseau. Le résultat de la collaboration des deux équipes est une chimère qui autorise un rêve : celui de réussir, un jour, à faire pousser des dents sur les mâchoires humaines dégarnies.
Comment ? Grâce, peut-être, à une greffe de cellules embryonnaires bien choisies. C'est l'opération à l'origine de cet oisillon dentu. Les chercheurs ont introduit, dans un embryon de poulet, des cellules provenant d'un embryon