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Libération

Les cigales fourmillent aux Etats-Unis

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publié le 13 mai 2004 à 0h36

Washington de notre correspondant

La terre, au pied de l’arbre qui se trouve devant le 4 127 Harrison Street, à Washington, est constellée de trous. A l’aube, hier, une larve en est sortie, après dix-sept ans passés sous terre à sucer les racines. Elle a grimpé au tronc, s’est arrêtée à mi-hauteur, s’est accrochée solidement. La carapace se fend au niveau du dos : une grosse bête ailée s’en extirpe, tombe mollement sur le dos. Son corps est encore blanchâtre, mais il noircit à vue d’œil. Ses yeux sont vermillon. Elle repart en zigzaguant vers l’arbre, pour rejoindre les milliers, bientôt milliards, d’autres cicadas («cigales») qui, comme elle, ont attendu dix-sept ans avant de refaire surface. Dans la rue, les troncs, les clôtures, les poteaux électriques sont couverts d’exosquelettes vides et translucides, accrochés comme des guirlandes. La chaussée est jonchée de tâches, cicadas écrasées. Les oiseaux piaillent joyeusement dans ce buffet à volonté. Vers huit heures, les enfants sortent, attrapent des cigales, scrutent leurs ailes. Ils savent que les dessins des nervures prédisent la paix ou la guerre. Cette année, le W est très lisible. Les parents, eux, se souviennent de la précédente vague, en 1987, avec des mines de dégoût : «Un bruit assourdissant, des trucs qui vous touchent le visage.»

Etranges. A l’est des grandes plaines américaines, les cigales ont commencé à sortir de terre, telles des mortes vivantes. Après la prochaine pluie, on les verra apparaître