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Libération

Le champignon et la fourmi à la vie à la mort

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publié le 8 février 2005 à 0h26

L'histoire naturelle que livre cette semaine la revue américaine Science (1) devrait faire les délices des écoles de commerce. Elle illustre en effet à merveille les bénéfices et risques des contrats dits «gagnant-gagnant», vendus sous le qualificatif irrésistible de win win, et définis dans le dictionnaire du management comme «le résultat d'une négociation favorable à chacune des parties». Les «parties» contractantes présentées ce vendredi dans Science sont en l'occurrence un champignon du genre des Lepiotaceae et une fourmi de l'espèce Acromyrmex, tous deux vivant communément sur le sol sud-américain et parfois dans des laboratoires de recherche étrangers (lire ci-dessous).

Fascinante. Les scientifiques s'intéressent en effet depuis cent vingt ans à ce végétal et à cet animal qui, pris séparément, n'ont rien d'une curiosité naturelle : la fourmi longue d'un centimètre vit sa vie sociale comme n'importe quelle fourmi, et le champignon crache ses filaments souterrains de façon ordinairement fongique. En revanche, les deux forment un couple d'une fidélité fascinante, puisque leur union fête ses 50 millions d'années. Union très agricole, puisque, depuis ce temps-là, la fourmi cultive et bichonne le champignon. Elle va aux champs, coupe des feuilles ­ au désespoir des agriculteurs humains­, les mâche, les empile en une couche propice à la propagation du champignon, qu'elle engraisse avec ses déjections et dont elle soigne même les infections par une friction de son thorax où log