Il faisait chaud dans l'Arctique en ce temps-là. Chaud et humide. L'océan affichait une température dans les 23 °C, des plantes flottaient à la surface de ses eaux stagnantes et peu profondes. C'était il y a 55 millions d'années, à l'ère cénozoïque. Une époque où la planète s'était vidée depuis belle lurette de ses derniers dinosaures, où les mammifères modernes émergaient, et où les grandes masses continentales se déplaçaient rapidement. Le climat, au pôle Nord, était alors subtropical. Et puis vint l'aube du grand refroidissement planétaire. Il y a 45 millions d'années, des glaces commencent donc à se former dans l'océan Arctique.
Arcanes. Telles sont les grandes lignes de l'histoire ancienne de l'Arctique, qu'il est possible d'entrevoir, pour la première fois, grâce au forage réalisé à une profondeur sans précédent, près du pôle Nord, par la mission Acex (Arctic Coring Expedition) qui livre une salve de trois articles, aujourd'hui, dans la revue Nature. Ces résultats éclairent non seulement les arcanes du climat, mais le rôle probable d'une diminution des gaz à effet de serre dans le refroidissement global qui a saisi la planète. Un phénomène édifiant à l'heure où l'on tente de prédire l'impact climatique de la hausse phénoménale des émissions de gaz carboniques.
Conduite par un consortium européen administré par l'Institut national des sciences de l'univers (Insu) du CNRS et groupant 17 pays, la mission Acex a permis de pratiquer des forages allant jusqu'à 430 mètres sous