Menu
Libération

Un moratoire sur le génie génétique

Article réservé aux abonnés
publié le 6 novembre 2007 à 1h18

C'était bien avant les plantes transgéniques, aux premières heures des manipulations génétiques. Au début des années 70, plusieurs équipes américaines mettent au point les premières techniques permettant de découper et assembler des fragments d'ADN provenant d'espèces différentes. Un des leaders de ces recherches, le futur Nobel de chimie 1980, Paul Berg, projette alors d'insérer dans la bactérie Escherichia coli un gène du virus SV40, connu pour être cancérigène. Or coli, comme l'appellent familièrement les biologistes, vit à l'état naturel dans le tube digestif humain. Berg se demande alors s'il ne risque pas de créer, par cette manipulation, une bactérie cancérigène. Le chercheur renonce à son expérience et fait part de ses inquiétudes à ses collègues. Dans une lettre publiée à l'été 1974 dans les principales revues scientifiques mondiales, le groupe de travail qu'il anime au sein de l'Académie des sciences américaine appelle à une pause dans les expériences de génie génétique. On arrête tout, on réfléchit, pour reprendre un slogan alors en vogue : ainsi débute un moratoire lancé à l'initiative des biologistes. Une forme d'autocensure scientifique sans précédent. Bombe atomique. Que craignaient alors Berg et ses collègues ? Tout, à vrai dire, tant l'ignorance était presque totale. «Les éléments d'ADN insérés dans E. coli pourraient se disséminer largement dans les populations humaines, bactériennes, végétales et animales, entraînant des conséquenc